28/03/2013

LUCIA DEMARIA - le pèlerinage entre introspection et solidarité


            
Rencontre avec Lucia Demaria, une personnalité volubile au caractère bien trempé et à l’âme vagabonde. Retour sur un parcours hors du commun sur les routes du pèlerinage entre introspection et altruisme.

Diplômée en histoire de l’art, guide touristique de profession, passionnée de tango, l'âme d’exploratrice de Lucia Demaria la pousse à la découverte permanente de nouveaux itinéraires. Aujourd’hui, c’est grâce à ses actions pour récolter des fonds destinés au financement de ses projets de solidarité que nous avons eu la chance de la rencontrer. C’est avec spontanéité qu’elle nous livre des morceaux choisis de ses pèlerinages, rebroussant pour nous les chemins entrecroisés de ses émotions et de ses pensées. Installées dans le confort ouaté de l’un des cafés les plus prestigieux du centre, nous voici embarquées par son talent de conteuse sur les sentiers d’Europe, sans qu’une seule goutte de sueur ne soit versée…


Sur le chemin de Santiago

Tout a débuté en 2007 lorsque Lucia décide, une nuit, de prendre un aller simple pour Madrid afin de rejoindre un tronçon du chemin de Compostelle (Santiago di Compostela en italien). Elle parcourt 1.000 km cette année-là en une quarantaine de jours. En 2009, sur la Via Podiensis (la voie du Puy) elle parcourt 650 km et réitère en 2010 son parcours initial. Historienne de l'art, Lucia possède certaines clés sur le papier mais dans le concret, les préparatifs répondent à d’autres nécessités à ne pas négliger: choix des chaussures, soins des pieds –essentiel- sélection du paquetage... 
Marcher "avec la rage dans le sac à dos" conduit à l'épuisement tant moral que physique. Il faut savoir prendre soin de soi  ("mi faccio una coccola"). Et c'est parfois difficile... le chemin qu'on ne trouve pas, la fatigue, la pluie, le froid, l'absence parfois de bienveillance de certains habitants. Lucia préfère cheminer seule (au grand dam de son fils), ce qui ne l’empêche pas occasionnellement de s’entourer d'inconnus car de belles rencontres se font aussi. Elle reconnaît qu'il est difficile de marcher avec d'autres : ce n’est pas seulement une question de rythme. Lucia n'a pas de plan de route strict et privilégie un esprit d'aventure, un esprit pèlerin où curiosité et liberté peuvent laisser place à l’inattendu. Elle peut ainsi s’arrêter pour visiter une église, partager un moment de détente avec d'autres...
En 2012, Lucia se lance un autre défi : sortir du balisage tranquille des chemins de Compostelle pour parcourir la Via Francigena beaucoup moins fréquentée et surtout donner une dimension plus altruiste à sa démarche.


Sur la via Francigena 
(La via Francigena passe par le Piémont, plusieurs itinéraires sont possibles)
Etablie en 994 et ponctuée de 81 étapes sur 1.700 km, la Via Francigena débute officiellement à Canterbury (Grande-Bretagne) mais Lucia part de Londres le 13 juin en espérant rejoindre Turin fin juillet. La traversée de la France du nord la secoue : "J’ai senti dans ma chair la mélancolie, le désespoir d’une solitude comme si la terre avait absorbé le sang de la première guerre mondiale." Le plan de route historique mentionne des chemins et croisements souvent disparus. L’office du tourisme français n’offre pas toujours les meilleurs renseignements tandis que les informations de certains passionnés locaux s’avèrent bien utiles. L'hébergement est parfois organisé, d'autres fois il peut confiner au sordide.

A chacun son pèlerinage 
Les pèlerins restent bien souvent discrets et pudiques sur leurs motivations. Elles peuvent être évidemment religieuses ou sportives comme Lucia a pu parfois le constater. Celles de Lucia garderont une part de leur mystère. Disons que chaque pèlerinage correspond à un cheminement personnel, différent à chaque fois, qui lui permet de consolider un socle constitutif d'un meilleur équilibre vers plus de gaieté, de légèreté et d’harmonie ("Je suis en syntonie avec la nature"). Si certains s’allongent pendant des années sur le divan du psy pour se libérer de leur prison intérieure, Lucia, elle, a choisi de marcher pour "sortir de la roue dans laquelle on court comme le hamster en cage". Cette capacité à relativiser ("les grandes questions deviennent plus petites") l’amène plus facilement à lâcher prise et à ressentir plus de compassion.

* La crédentiale est le passeport du pèlerin. Il lui permet de justifier de son statut de pèlerin, en particulier pour l'accès aux gites d'étape, mais aussi dans le cas de Compostelle, d'avoir la Compostella ("attestation") à la fin du parcours : des tampons recueillis à chaque étape valident le parcours. Cela dit, pour avoir la Compostella, il suffit d'avoir parcouru les 100 derniers kilomètres à pied.

Inépuisable sur les nombreux sujets qui la passionnent, elle conjugue donc sa force et sa sensibilité pour servir au mieux ses engagements. Ainsi le 18 décembre dernier, c’est au départ de Rome que Lucia a découvert la Via Francigena Sud pour atteindre le sanctuaire de Saint-Michel du Gargano (qui est un point géographique dans l'alignement du Mont-Saint-Michel et de la Sacra San Michele située dans le Piémont). Elle était cette fois-ci accompagnée par un Français lui-même pèlerin confirmé, celui que le hasard a désigné pour retrouver sa crédentiale* égarée ! Nos pensées ont donc accompagné Madame Panna Cotta et Monsieur Moutarde comme ils se sont baptisés réciproquement et nous espérons pouvoir un jour vous livrer le récit  de cette aventure quasi romanesque. En attendant, nous souhaitons à Lucia de continuer d’arpenter la vie avec autant d’audace et d’enthousiasme !


Lucia endure mais elle veut servir sa cause car ce pèlerinage, elle l’articule à des actions de solidarité orientées en trois points:
    vers l’Ethiopie pour la construction d’un puits,
    vers l’association Apertamente pour soutenir le projet d’intégration des femmes arabes et extracommunautaires  dans le quartier turinois du Balon,
    vers l’association Seminando Amaranto du quartier turinois Borgo Dora-Balon pour développer des actions sportives et ludiques en vue de favoriser l’intégration des plus jeunes.
Pour ce faire, Lucia recherche un soutien financier que ce soit par la recherche de sponsors ou de publications, de conférences ou d’évènements particuliers. Pour en savoir plus, le mieux est de suivre Lucia sur son blog camminate con me .