Rencontre
avec Lucia Demaria, une personnalité volubile au caractère bien trempé et à
l’âme vagabonde. Retour sur un parcours hors du commun sur les routes du pèlerinage
entre introspection et altruisme.
Diplômée en histoire de l’art, guide
touristique de profession, passionnée de tango, l'âme d’exploratrice de Lucia
Demaria la pousse à la découverte permanente de nouveaux itinéraires.
Aujourd’hui, c’est grâce à ses actions pour récolter des fonds destinés au
financement de ses projets de solidarité que nous avons eu la chance de la
rencontrer. C’est avec spontanéité qu’elle nous livre des morceaux choisis
de ses pèlerinages, rebroussant pour nous les chemins entrecroisés de ses
émotions et de ses pensées. Installées dans le confort ouaté de l’un des cafés
les plus prestigieux du centre, nous voici embarquées par son talent de
conteuse sur les sentiers d’Europe, sans qu’une seule goutte de sueur ne soit
versée…
Sur le chemin de Santiago
Tout a débuté en 2007 lorsque Lucia
décide, une nuit, de prendre un aller simple pour Madrid afin de rejoindre un
tronçon du chemin de Compostelle (Santiago di Compostela en italien).
Elle parcourt 1.000 km cette année-là en une quarantaine de jours. En 2009, sur
la Via Podiensis (la voie du Puy) elle parcourt 650 km et réitère en
2010 son parcours initial. Historienne de l'art, Lucia possède certaines clés
sur le papier mais dans le concret, les préparatifs répondent à d’autres
nécessités à ne pas négliger: choix des chaussures, soins des pieds –essentiel-
sélection du paquetage...
Marcher "avec la rage dans le sac à dos"
conduit à l'épuisement tant moral que physique. Il faut savoir prendre soin de
soi ("mi faccio una coccola"). Et c'est parfois
difficile... le chemin qu'on ne trouve pas, la fatigue, la pluie, le froid,
l'absence parfois de bienveillance de certains habitants. Lucia préfère
cheminer seule (au grand dam de son fils), ce qui ne l’empêche pas
occasionnellement de s’entourer d'inconnus car de belles rencontres se font
aussi. Elle reconnaît qu'il est difficile de marcher avec d'autres : ce n’est
pas seulement une question de rythme. Lucia n'a pas de plan de route strict et
privilégie un esprit d'aventure, un esprit pèlerin où curiosité et liberté
peuvent laisser place à l’inattendu. Elle peut ainsi s’arrêter pour visiter une
église, partager un moment de détente avec d'autres...
En 2012, Lucia se lance
un autre défi : sortir du balisage tranquille des chemins de Compostelle
pour parcourir la Via Francigena beaucoup moins fréquentée et surtout donner
une dimension plus altruiste à sa démarche.
Sur la via Francigena
(La via Francigena passe par le Piémont, plusieurs itinéraires sont possibles)
Etablie en 994 et ponctuée de 81
étapes sur 1.700 km, la Via Francigena débute officiellement à Canterbury
(Grande-Bretagne) mais Lucia part de Londres le 13 juin en espérant rejoindre
Turin fin juillet. La traversée de la France du nord la secoue : "J’ai
senti dans ma chair la mélancolie, le désespoir d’une solitude comme si la
terre avait absorbé le sang de la première guerre mondiale." Le plan
de route historique mentionne des chemins et croisements souvent disparus.
L’office du tourisme français n’offre pas toujours les meilleurs renseignements
tandis que les informations de certains passionnés locaux s’avèrent bien utiles.
L'hébergement est parfois organisé, d'autres fois il peut confiner au sordide.
A
chacun son pèlerinage
Les pèlerins restent bien souvent discrets et
pudiques sur leurs motivations. Elles peuvent être évidemment religieuses ou
sportives comme Lucia a pu parfois le constater. Celles de Lucia garderont une
part de leur mystère. Disons que chaque pèlerinage correspond à un cheminement
personnel, différent à chaque fois, qui lui permet de consolider un socle
constitutif d'un meilleur équilibre vers plus de gaieté, de légèreté et
d’harmonie ("Je suis en syntonie avec la nature"). Si certains
s’allongent pendant des années sur le divan du psy pour se libérer de leur
prison intérieure, Lucia, elle, a choisi de marcher pour "sortir de la
roue dans laquelle on court comme le hamster en cage". Cette capacité
à relativiser ("les grandes questions deviennent plus petites")
l’amène plus facilement à lâcher prise et à ressentir plus de compassion.
* La crédentiale
est le passeport du pèlerin. Il lui permet de justifier de son statut de
pèlerin, en particulier pour l'accès aux gites d'étape, mais aussi dans le
cas de Compostelle, d'avoir la Compostella ("attestation") à la fin
du parcours : des tampons recueillis à chaque étape valident le
parcours. Cela dit, pour avoir la Compostella, il suffit d'avoir parcouru les
100 derniers kilomètres à pied.
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Inépuisable sur les nombreux sujets qui
la passionnent, elle conjugue donc sa force et sa sensibilité pour servir au
mieux ses engagements. Ainsi le 18 décembre dernier, c’est au départ de Rome
que Lucia a découvert la Via Francigena Sud pour atteindre le sanctuaire
de Saint-Michel du Gargano (qui est un point géographique
dans l'alignement du Mont-Saint-Michel et de la Sacra San Michele située
dans le Piémont). Elle était cette fois-ci accompagnée par un Français lui-même
pèlerin confirmé, celui que le hasard a désigné pour retrouver sa crédentiale*
égarée ! Nos pensées ont donc accompagné Madame Panna Cotta et Monsieur
Moutarde comme ils se sont baptisés réciproquement et nous espérons pouvoir un jour vous livrer le récit de cette aventure quasi romanesque. En attendant, nous souhaitons à Lucia de continuer d’arpenter la vie avec autant d’audace et
d’enthousiasme !
Lucia
endure mais elle veut servir sa cause car ce pèlerinage, elle l’articule à
des actions de solidarité orientées en trois points:
• vers l’Ethiopie pour la construction
d’un puits,
• vers l’association Apertamente pour
soutenir le projet d’intégration des femmes arabes et
extracommunautaires dans le quartier turinois du Balon,
• vers l’association Seminando Amaranto
du quartier turinois Borgo Dora-Balon pour développer des actions sportives
et ludiques en vue de favoriser l’intégration des plus jeunes.
Pour ce
faire, Lucia recherche un soutien financier que ce soit par la recherche de
sponsors ou de publications, de conférences ou d’évènements particuliers.
Pour en savoir plus, le mieux est de suivre Lucia sur son blog camminate con me .
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