29/10/2012

Le kitsch c'est chic! ... Merci Lucille pour ta plume


Amandine, c'est elle!
“Ohhhh un bougeoir en forme de sanglier!! C’est kitsch!! J’achète!!” s’extasiait Amandine alors que nous brocantions dans un coin reculé en province. C’est vrai que pour deux euros ça valait le coup. Certains diront que cela fait déjà trop cher, moi cela me fait surtout sourire.


Mais qu’est ce que le kitsch? Tout de suite on pense aux nains de jardin, aux horloges assiettes, aux boules à neige, tous ces bibelots au pouvoir décoratif douteux que l’on essaye de revendre des années plus tard dans des vide greniers. Le kitsch c’est ringard. Et pourtant. Aujourd’hui, il s’offre une nouvelle identité grâce à la mode… 

Qu’il soit baroque, pop, rétro, disco, burlesque, à travers les grosses lunettes, la surenchère de breloques, les fourrures synthétiques, les tee-shirt Disney, les imprimés figuratifs et géométriques ou les associations de couleurs inhabituelles, les Crocs, les excès de maquillage et bien sûr les best seller du genre: les tee-shirts Johnny ou motifs  tête de loup sur fond de pleine lune. Un seul mot d’ordre: le second degré. Affectif et passionnel, le kitsch est un art du bonheur.

Les magazines de mode sont friands de rubriques “Fashion police” où des individus soit disant qualifiés notent les tenues des peoples sur 10. Je me souviens d’une actrice, il y a quelques années qui arborait une robe verte pomme avec des bottes blanches en PVC au Festival de Cannes. Les magazines avaient crié au scandale vestimentaire. Enfin cette liberté que permet le kitsch est un moyen pour mettre fin à la dictature du goût. Mêmes les marques de luxe s’y mettent; Carven n’hésite pas à imprimer des scènes de vie moyennageuse sur une de ses robes de la dernière collection. Miu Miu fait revivre de gros imprimés géométriques et des accessoires surdimensionnés. Le mauvais goût est sublimé et assumé. C’est peut-être la fin de la règle des trois couleurs et des associations interdites. Qui a dit que le vert ne pourrait pas se porter avec le jaune?

Amandine, elle, ne suit aucunes règles. Elle porte de la fourrure avec de la paillette, des robes roses, vertes, à fleurs avec des ceintures dorées, d’ailleurs elle le dit elle-même, le doré c’est bien plus kitsch que l’argent. Elle arbore toujours une bonne quantité de breloques autour du cou. Mais elle a l’oeil et le sens du détail. Tout se fait très naturellement. Pour elle, le kitsch, ce sont des pièces ringardes qui, bien associées forment un ensemble intéressant mais hors norme.

D’inspiration rétro, elle est sensible aux chapeaux melons ou aux belettes en fourrure avec les griffes encore visibles! Etant petite, elle idéalisait le look de Miss Fine dans une nounou d’enfer. Mais elle alimente son imaginaire avec toutes les images qu’elle voit dans les magazines, sur internet et surtout dans les films et dessins animés (Burton, Kubrick, Tarantino).Que des réalisateurs avec un univers très fort, mystérieux et fantasque. Elle cite Alex dans Orange Mécanique qui est par ailleurs son film préféré de tous les temps. Une chose est sur Amandine aime les personnages excentriques. L’éxcès et l’éxagération sont en effet deux grandes lignes de conduite du kitsch.
Pour satisfaire ses envies peu communes, Amandine s’approvisionne la plupart du temps en friperie, brocante ou vide greniers. C’est d’abord la couleur qu’elle repère puis la coupe et les artifices. Parfois, elle y apporte ses retouches, raccourcit les robes, brode quelques perles, coud des cols dentelle. Il y a quelques jours, elle m’a dit avoir découvert une nouvelle adresse parisienne pour élargir sa garde robe déjà bien remplie. “Cette fois-ci je m’achète quelque chose de portable”: me dit-elle en entrant dans la boutique Goldy Mama, un mini temple du kitsch perdu au fin fond du XXè. Un lieu qui arbore un papier peint orange et rose au mur, des lustres en faux cristal au plafond et des peaux de bêtes au sol. Un décor de cinéma. Amandine se jette à l’assaut des portants, quelques minutes plus tard je la retrouve bras chargés dans lesquels je distingue  une robe blanche à froufrous, une jupe longue à fleurs et une robe noire à broderies dorées.
Et pourtant, non non Amandine, ce n’est pas Mme Irma, ni marginale, ni déjantée, elle refuse les préjugés à la façon de s’habiller. Stagiaire dans une maison de vente aux enchères, son rêve serait de pouvoir s’habiller librement au travail. Véritable collectionneuse d’objets en tout genre, sa chambre est un musée de poche. Comme dans une toile baroque, il y règne une impression de bazar organisé. Tant est si bien qu’elle-même se fond dans le décor. Cette passion pour les objets lui vient de toutes les brocantes qu’elle fait depuis toujours. L’imagerie religieuse constitue un potentiel kitsch énorme, pour exemple ce Jésus qui se change en Marie quand on se déplace. Tout est récupération ou acheté à petits prix, ce crâne de vache par exemple a été ramené du maquis corse, des chapeaux haut de forme et animaux empaillés, le tout formant une sorte de nature morte comme une vanité contemporaine.