15/04/2013

« Heureux d’être malheureux : le cas français ».

Si vous n'avez pas le temps de vous attarder sur cet article lié aux travaux de Claudia Senik sur l'économie du bonheur http://www.rue89.com/2013/04/03/malheur-francais-cest-quelque-chose-quon-emporte-soi, en voici quelques grandes lignes significatives: 


"La France était tout le temps en dessous des autres pays en termes de bien-être moyen.Les Français transforment systématiquement un niveau de vie donné en un niveau de bonheur moindre que les autres pays en moyenne. Et cet écart est assez stable depuis qu’on a des données (les années 70). Quand on est en France, toutes choses égales par ailleurs, on a 20% de chances en moins d’être heureux – en tout cas de se dire très heureux."




"Dans de grandes enquêtes auprès de dizaines de milliers d’individus, en plus des questions habituelles sur leurs circonstances objectives de vie (leur âge, leur métier, leur statut d’emploi, leur situation matrimoniale...), on introduit des questions plus subjectives. On leur demande de se situer en termes de bonheur, de satisfaction dans la vie, sur une échelle de 0 à 10. En Europe, la moyenne est à 7,6. Certains pays scandinaves sont au-dessus de 8. La France est à 7,2. C’est particulièrement faible."

"Ils (les expatriés français) sont en moyenne moins heureux que d’autres expatriés européens. Ce qui prouve bien que c’est quelque chose qu’on emporte avec soi. C’est dans la tête."

"Je partage les conclusions des frères d’Iribarne, qui ont écrit qu’il y avait une contradiction dans le système français entre élitisme et égalitarisme. On dit à tout le monde : il y a égalité des chances... Mais on a un système super élitiste et unidimensionnel."
"Il y a donc très peu de gens qui ont l’impression d’être vraiment au top. Ils se voient comme étant en échec ou moyens. A force d’être éduqués avec cette échelle de 0 à 20, beaucoup finissent par se voir au milieu de l’échelle. L’école française a plein d’avantages, elle produit des gens très bien formés, mais ce n’est pas l’école du bonheur."
"Quand on répond à une question sur le bonheur, on a toujours en tête des éléments de comparaison. C’est par rapport à un monde de possibles, à un certain niveau d’exigence. Les Français ont peut-être un niveau d’exigence plus élevé que les autres, ou une nature d’exigence différente."
Est-ce que les Français se complaisent dans ce malheur ?  "Je pense qu’ils sont attachés à un idéal qui ne correspond pas au monde tel qu’il est. En termes un peu psychanalytiques, il y a un bénéfice à cela. On se berce de l’idée qu’on est le pays de l’universalisme, des Lumières, de la Révolution, un grand pays. Ça nous fait du bien, mais après on le paye, on en souffre, parce que ça ne correspond plus à ce qu’est la France aujourd’hui."
Si vos hypothèses sont validées par la communauté scientifique, quelles conclusions devraient en tirer les pouvoirs publics ?  "Bouleverser l’enseignement des langues... Cela nous empêche de nous sentir autant citoyens du monde qu’on le devrait. "
"On ne peut pas exiger de tout le monde de se concentrer, de rester toute la journée assis sur une chaise quand on est un enfant !"
"Donner l’impression aux gens, dès le début de leur vie, que la réussite est multidimensionnelle, qu’il y a différentes manières de réussir et qu’elles sont toutes aussi légitimes les unes que les autres serait un grand progrès."